Le blog d'Ovary

Si elle n'existait pas vous l'auriez inventée

IRM mon amour

J’attendais tranquillement dans la salle d’attente, enfin non, pas du tout tranquillement, les pieds qui s’agitaient, les mains tout autant, l’envie de partir en douce et de plus jamais donner de nouvelles à personne.

Elle est où la fille pour l’IRM ? Elle n’existe pas Gérard, y a pas de fille.

On m’a confié un petit questionnaire sur ma vie, j’adore raconter ma vie, l’histoire de mes cicatrices, mon allergie à un antibiotique alors que personne n’a de preuve, paraît juste que j’ai vomi quand j’étais petite. On me demandait aussi si j’étais claustrophobe et là, j’ai vachement hésité. Je supporte les ascenseurs quand ils fonctionnent et je dors très bien la porte de l’appartement fermée, mais je ne savais pas trop où me situer à dix minutes de l’enfermement dans une boîte plus petite qu’une machine à UV. La seule fois où j’ai fait des UV, j’ai paniqué au bout de trois minutes en croyant être là depuis quarante, complètement oubliée du monde, plus de dame, plus personne pour venir me chercher, alors je gardais un bras dehors, le corps à bout de souffle, en essayant de me calmer et en me jurant qu’une peau blanche comme un cul, ça ferait l’affaire pour le restant de ma vie.

Donc bref, j’ai hésité à répondre que j’étais claustrophobe, parce que l’idée d’être enfermée me mettait mal à l’aise et des fois qu’un traitement de faveur soit mis en place pour les grands angoissés, j’aurais trouvé ça bien arrangeant. La peur de mentir mêlée au besoin de me sauver la vie par anticipation ont fait que je n’ai rien répondu du tout. Je laissais un suspens des fois qu’on me dise : vous n’avez pas répondu à la question, du coup on est obligé d’annuler.

Quand j’ai vu qu’il fallait également inscrire la personne à appeler en cas d’urgence, j’ai été balancée entre la fierté de mettre mon mec et non plus mon père, et l’importance de la question. Que peut-il bien se passer de si dramatique pour qu’on appelle mon mec. Mille films ont couru mon cerveau et j’ai vraiment décidé de partir et je suis restée. Je ne savais plus si j’étais lâche ou courageuse.

Un jeune homme m’a appelée et m’a demandé de me déshabiller. Culotte, tee-shirt, sans soutien-gorge, et gardez votre écharpe en guise de plaid, il fait froid. J’ai presque trouvé ça érotique, sauf mon odeur de transpiration, j’avais eu le temps de perdre cent litres d’eau puante sous chaque bras et je me trouvais mal polie.

Ensuite, le jeune homme a saisi mon questionnaire, qu’il a parcouru vite fait. Il n’en avait rien à carrer que je n’aie pas précisé ma potentielle claustrophobie et il ne m’a rien demandé. Seulement de m’allonger. Il m’a foutu une petite pompe dans la main pour l’appeler en cas de besoin, je l’ai serrée tellement fort dès la première seconde, face à lui parmi les vivants, qu’il a hésité à déclencher l’examen. Je l’ai rassurée en lui disant que tout allait bien alors que tout allait mal et j’ai instantanément fermé les yeux afin de garder une part de mystère : ne pas savoir où on m’emmenait.

J’ai ri avec moi-même dès les premiers instants, quand j’ai senti que mon lit partait vers l’arrière, parce que je me sentais très détendue et ridicule d’avoir eu si peur. C’était en fait hyper facile. Il suffit de ne pas regarder. Du coup, je m’imaginais dans un grand pré, courant à poils ou plutôt en culotte, sous un grand soleil, avec malgré tout des bruits de marteaux piqueurs et autre travaux en tout genre. La promenade avait son charme et je respirais si bien qu’il me semblait impossible d’être enfermée.

Quand le bruit a cessé, moi qui dormais presque en pensant à mon roman, complètement stone, j’ai alors ouvert les yeux pensant que c’était terminé. Erreur de ma vie, je me suis retrouvée nez à nez avec un plafond plus près tu meurs, dans une boîte aussi étroite qu’un stick de mozzarella et j’ai commencé à paniquer. Le mec est parti déjeuner ou quoi. Dans les films, ça commence toujours comme ça. La fille se réveille enfermée dans une boîte, elle ne sait pas pourquoi elle est là, elle tape partout, elle hurle, putain est-ce que c’est ça la mort, je veux sortir moi, prendre l’air, j’ai des trucs à faire, au secours.

J’ai crié au secours dans ma tête, je n’ai pas osé emmerder mon monde, pourtant je me disais la situation est peut-être dangereuse et toi tu n’as aucun instinct de survie. J’ai tenu la pompe très fort en fermant de nouveau les yeux, la poitrine serrée et l’envie de crier, j’ai tenté de me calmer, de ramener à moi mille exercices de sophrologie et je me suis mise à chanter Pour que tu m’aimes encore de Céline Dion, dans ma tête, pour m’apaiser. Visiblement, c’est la seule chanson que je connais par cœur. Le bruit fou a repris en plein dans mon concert et j’étais sûre de tenir un Remix.

Quelques secondes plus tard, j’ai senti que c’était vraiment la fin, la table sur laquelle j’étais couchée bougeait et la sonnette d’alarme m’a été retirée des mains. Mademoiselle, c’est bon. Mademoiselle. Mademoiselle. Je craignais d’ouvrir les yeux. Je voulais être sûre de voir le type de tout à l’heure, avec ses gros cheveux bouclés, et non plus une cage. Il m’a demandé si tout s’était bien passé. J’ai assuré que oui sauf quand j’ai ouvert les yeux. Il a rigolé. J’ai rigolé. On a rigolé et j’ai quand même vu que j’avais du poil aux pattes quand il a fixé mes mollets.

Je suis sortie de là très fière de moi, comme une gamine de quatorze ans qui venait de rouler sa première pelle et réalisait que ce n’était pas si compliqué que ça.

1 Commentaire on IRM mon amour

  1. Le_Renard_Polaire
    16 septembre 2015 à 11 h 37 min (7 mois ago)

    Effectivement une grande aventure qui ne nécessitait pas moins de mots pour évacuer cette expérience.

    Je ne l’ai jamais vécu personnellement et j’ai été mis dehors quand j’ai voulu accompagner madame, qui m’a raconté une expérience plutôt similaire…

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