Le blog d'Ovary

Si elle n'existait pas vous l'auriez inventée

Victime d’un terrible mensonge

Parce que Camille nous parlait il y a quelques jours des Cloches et autres mythes d’enfance, et comme je m’apprêtais à laisser un commentaire bien long sur son blog, j’ai plutôt opté pour un petit billet Ovary à la ferme (c’est là que je rêve de te dire que je m’appelle Caroline et que j’ai failli m’appeler Martine*) pour te raconter le plus grand mensonge dont j’ai été victime petite, à la campagne, et pendant des années (normalement, t’es déjà un peu ému).

Donc.

Quand j’étais petite, et parce qu’il était grand, une vraie figure de papi, je le croyais.

Pour la soupe qui fait grandir, j’avais cependant des doutes, parce que je voyais bien que j’avais une croissance normale, et qu’après j’ai voulu faire quelques études (une sorte d’équation que tu ne pourrais pas comprendre avec des navets et des courbes de croissance au carré) pour décider de mes apports journaliers en potion de légumes, à savoir dans quelle mesure il était important que je me force pour devenir bonnasse et pouvoir mettre des talons un jour sans dépasser un homme. J’ai compris rapidement qu’on était en train de me leurrer avec une fâcheuse histoire de cinq fruits et légumes par jour, et que dotée d’une taille déjà convenable, j’étais simplement victime d’un énorme mensonge qui se voulait bon pour ma santé.J’ai choisi de ne plus le croire, mais ma naïveté en a décidé autrement.

Pour siffler, il faut manger de Rouy, me disait-il.

(Si tu ne sais pas ce que c’est, j’en conclus que tu ne sais pas siffler, et c’est triste.)
Donc moi, qui essayais nuit et jour de siffler, d’agiter les lèvres, les serrer, les frotter mais en vain, je me suis dit punaise-pas-con, c’est peut-être ça le secret. Et comme j’étais dans l’optique d’impressionner les garçons dans la cour de récré, et mieux, de les dresser, il me fallait progresser. Je voyais mon grand-père manger un morceau, siffler juste et toujours mieux que la fois précédente, puis me regarder l’air de dire tu vois, c’est tout con, mange ma fille.

Je ne progressais pas vite, donc forcément, je trouvais ça louche. J’ai du coup fait de nouvelles équations, en tailleur entre un coq et un cochon (pour qu’on se sente un peu plus à la ferme quand même). J’en ai déduit que le Rouy n’étant pas un aliment bon pour ma santé au même titre que la soupe, mon grand-père n’avait aucun intérêt à me gaver de ce miraculeux fromage si ce n’était pour siffler comme une femme. Donc forcément, j’y ai cru.

Puis la bonne nouvelle, c’est qu’au bout de quelques années de Rouy, même si l’overdose s’en est suivie, j’ai su siffler et plutôt bien.

Et j’ai compris, tard, que ça n’avait rien à voir avec le lait de vache et la pâte molle.
Comme première conclusion, je te dirais quand même qu’il suffit donc de croire en quelque chose pour y arriver.
Comme seconde, je ne sais pas, j’hésite : je ne supporte plus le Rouy, de sa couleur à son odeur – ou – en plus d’avoir la taille qu’il faut aujourd’hui, je sais siffler un homme, et ça, merci Papi.

*C’est pas vrai, j’ai pas failli m’appeler Martine, relax.

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