Le blog d'Ovary

Si elle n'existait pas vous l'auriez inventée

Dimanche à la campagne (oyé oyé)

Donc en fait, au départ, je m’étais faite bonnasse. Enfin, je m’étais coiffée quoi. Ça allait contre ma philosophie du dimanche, mais comme j’étais reçue, et qu’on allait manger un barbecue entre adultes consentants, j’ai trouvé que ça se faisait. Puis bon, maintenant que j’ai récupéré la frange, faut la dresser.

La surprise, c’est qu’ils sont tous venus avec leurs enfants. C’est là que j’ai réalisé combien je pouvais dire putain et merde dans une même phrase et que c’est pas joli.

Je me sentais entre deux générations. J’étais au milieu de celle qui joue à la guerre et de celle qui parle d’accouchement.

Une des gamines me répétait en boucle : t’es trop belle. T’as trop de chance, t’es trop belle. J’ai dit merci mais toi plus et après on s’est disputé pendant quinze minutes à qui était la plus moche. Je me sentais à l’aube d’une marelle en pleine cour de récré. Alors je lui ai fait un tour de magie après qu’on ait couru culs nus dans le jardin et elle était tellement impressionnée qu’elle me trouvait trois fois plus belle. Je lui ai demandé pourquoi ça marchait pas avec les mecs, mais elle a pas compris. Puis je lui ai dévoilé le secret du tour, des fois qu’un jour ça puisse l’aider à séduire l’homme en masse.

Toute la tribu a décidé de jouer à Geocaching. Une chasse au trésor mondiale, qui, a priori, a débuté au Canada il y a quelques années de là. Je me croyais alors en vacances, ou Tata d’une famille nombreuse, les parents préparaient des sacs à dos avec des goûters.

Je me sentais décalée parce que je pensais à mon boulot quand ils pensaient à faire des crêpes.

On est parti chercher le trésor et je me suis demandé sur quoi j’allais tomber. Une bague de fiançailles, un éditeur, un trèfles à quatre feuilles, Carlos ou une petite drogue dure. Il a commencé à pleuvoir bien fort mais l’idée même de trouver un butin te donne des forces dingues.

Tu les passes tes montagnes.

Je portais juste un chemisier qui pleurait sa mère sous les gouttes d’eau (il a un jour) et des talons. Mais bon, ce sont des talons tout terrain, rassure-toi.

Au bout de quelques instants, et trempée jusqu’à l’os, la petite m’a crié que son vélo n’avançait plus. Alors qu’on avait perdu le reste du groupe et qu’on était paumé au milieu de nulle part, j’ai foutu les doigts dans les chaînes, j’ai remis sa bestiole d’aplomb. J’avais pas fait de manucure, l’humanité entière s’en voyait soulagée.

Et puisque tu dis bordel, quelle fille superficielle, je te signale alors que j’étais pas épilée. Mais alors là, pas du tout. Et quand je t’écris toujours pas, donc dans le genre aventure, je suis plutôt bonne et animale tu vois. Je collais à la forêt et c’est un don de coller à la forêt.

J’ai été élevée dans les bois moi, tu crois quoi.

Puis depuis que j’ai mangé de la bouffe pour poisson, j’ai le muscle développé.

On a quand même marché trois heures. Les fringues à essorer, les mains noires, je faisais du vélo d’enfant parce que la petite n’en pouvait plus et j’avais un parapluie Hello Kitty qui ne m’abritait de rien mais m’abritait en rose.

Quand on a trouvé le trésor, et le reste du groupe, j’ai constaté que ce n’était pas Carlos et j’en chiale encore.

Mais ça m’a fait plaisir de gagner une bille plate. Elle porte en elle un dimanche à la campagne, l’impression alors de sortir un peu de soi, de se vider la tête et de prendre conscience de mille choses. J’ai eu la sensation de capter l’essentiel (philosophe un peu, merde).

Le tout étant qu’en rentrant à Paris (et ça faut que je t’en parle, c’est un problème), j’ai eu ma montée de bonheur, parce que Paris, parce que ses boulevards, parce que moi ici, mais minuscule la montée. Il manquait un truc. Paris c’est bien, mais c’est peut-être mieux quand il me manque. Paris c’est bien, mais pas ce soir.

Il faut dire que dans la bagnole, je suis tombée sur Emmenez-moi d’Aznavour. J’ai eu envie de partir, de foutre un coup de volant, vers le nord ou qu’en sais-je. J’ai ressenti le besoin de ne pas rentrer. Je n’ai pas rêvé de ma porte d’entrée. Et maintenant que j’ai retrouvé mon canapé pour t’écrire, j’hésite à me repasser la fameuse chanson.

Ou à m’épiler.

Finalement, je me demande si la vraie vie c’est pas de faire des crêpes après que tout le monde ait enlevé ses bottes en caoutchouc en réclamant une boisson chaude. Et en disant, tout bêtement : putain (enfin, sacrebleu) ça fait longtemps qu’on n’ait pas monté à la Capitale, faudra p’t’être bien qu’on y passe un de ces quatre.

(Une minute de silence pour Carlos, je vous en prie). Big Bisous, Big Bisous.

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