Le blog d'Ovary

Si elle n'existait pas vous l'auriez inventée

J’ai un rêve

J’ai toujours eu mille rêves. De ceux qui te torpillent le ventre, t’aident à dormir mais peuvent te causer une grave dépression parce qu’irréalisables.

Quand j’étais gamine, je rêvais de vivre dans une grande maison avec toute ma famille et tous mes amis pour qu’on soit toujours 700 (je connais du peuple). Je faisais même des plans de baraque que je pensais présenter à mes parents, mais c’est aussi l’époque où je n’avais pas la notion de l’argent (j’avais cinq ans) et je pensais que sur un compte il y avait toujours dix zéros. Un jour, ils ont chipoté sur le prix des papiers peints quand j’ai voulu relooker ma chambre et j’ai compris, et ce fut une période très triste de ma vie, que j’étais foutue, que les sous ça se comptait et que jamais on vivrait dans une immense maison avec cinquante chambres et quinze cuisines.

Un peu plus tard, j’ai eu le rêve d’avoir dix enfants et de les emmener au ski en monospace (oui comme dans la chanson de Bénabar, sauf que dans la chanson, on ne sait pas où ils vont). J’aurais fait un genre de mère au top, clope au bec sur piste noire, hurlant aux mômes (Gabrielle, Lou, Lucas, Patrick Sébastien, Elsa, Alfred, Jules, Lolita, plus-d-idées, plus-d-idées) attendez votre pauvre mère, elle n’a plus votre âge.

Mais comme ce n’était pas réalisable de suite, j’ai vite baissé les bras. J’y repense souvent, mais je me dis que pour partir demain, faudrait quand même que je me démerde rapidos pour choper un monospace, c’est pas dit que je m’en sorte.

A force d’avoir des rêves non atteignables au prochain réveil, je me suis mise à écrire. Je me suis dit qu’au moins, j’avais la liberté d’imaginer ce que je voulais et de tout retranscrire. Mais rapidement, j’ai rêvé de publier et même si je suis à l’aube d’un pourquoi-pas-presque-faisable-bien-parti, ce n’est toujours pas pour demain-demain. Or je suis sûre qu’il y a des rêves qu’on peut presque réaliser maintenant.

A la limite, le seul rêve que je réalise tous les jours c’est : putain les gars je rêve de faire pipi. Et je me lève, et j’y vais. Et quand je fais pipi je pense à mes dix enfants en monospace cachés dans quinze cuisines pour faire des farces et je comprends bien que faire pipi c’est un rêve à la con.

Tout ça pour te dire que j’ai un rêve fou depuis hier. Enfin, non pas fou. Plutôt humble, plutôt simple, plutôt réalisable, plutôt banal. Un rêve que vous avez tous. Enfin, je suis certaine que pour certains d’entre vous ce rêve est à vos rêves ce que mon rêve de pipi est à mes rêves (oui je sais, tu relis, tu piges pas).

Je rêve de partir en vacances.
Juste d’une chaise longue et d’une paille à foutre dans le coca light.
Je rêve juste de dormir jusqu’à vomir parce que le soleil m’aurait décapée, je rêve de ne plus regarder l’heure et même de me la péter en faisant du dos crawlé, je rêve de ne plus savoir qui de lundi ou mardi arrive en premier dans la semaine, je rêve de ne rien faire, de ne plus penser, je rêve d’une pause qui durerait quinze jours ou de quinze jours qui dureraient dix mois. Je rêve à chaque bruit de flotte d’être embarquée dans une piscine immense, à chaque goutte d’eau qui me tombe dessus de boire la tasse trois fois. Je rêve du sable qui pique, du sable qui gratte, je rêve d’avoir trop chaud, de gueuler sous un chapeau de paille qu’on est garé trop loin, je rêve de me brûler le fessier sur le siège de ma bagnole, je rêve de faire un karaoké débile et de chercher le sommeil des heures dans un drap bouillant. Je rêve tout simplement de me lever tôt, qu’il ne fasse pas vraiment jour, de constater qu’un départ pour les vacances donne une pêche qu’on ne soupçonne pas, d’embarquer dans une voiture, un train, une barque, ou même en trottinette, et de me retrouver devant un ciel si bleu que j’en pleurerais de joie et que j’appellerais mes parents pour le dire : tout est possible, les plans sont dans le deuxième tiroir de droite.

Petit billet pour grand ami

Le plus beau cadeau qu’il m’ait fait, c’est de se benner la gueule en vélo le soir de mes vingt-cinq ans et de finir la tronche en sang. Il porte encore les marques sur son visage, une trace de mon anniversaire, de nos verres soulevés, un trace tout simplement et pour toujours. Lui qui ne me dira jamais que je compte au moins jusqu’à demain. Il se planque sous sa pudeur, bien souvent, se capuche et s’éloigne.

J’ai reçu un compliment, en dix ans d’amitié.

Mais c’était pas rien.

Et c’était au Mac Do.

On m’a demandé dix fois si j’avais déjà couché avec lui et j’ai beau répondre que ça me dérange d’imaginer qu’il est muni d’un engin, beaucoup continue de penser qu’on se ment.

Mais on s’en fout. Il n’y a pas de plus belles vérités.

Je ne l’ai jamais vu en slip.

Je crache à l’instant même entre les touches de mon clavier (tiens c’est fou ça nettoie).

Il me prouve chaque jour que l’amitié fille garçon existe, moi qui y croyais si peu.

On se voit, on parle des heures, il me raconte ses filles et ses hésitations. Je lui parle de mes errances. Ma dernière belle rencontre ou mon dernier chagrin. Ou ma dernière belle rencontre dans son jus de chagrin. Il m’écoute, me conseille, n’oublie aucun détail. Et quand il a un peu bu, il accepte que je pose ma tête sur son épaule et ne sait pas combien j’y trouve le réconfort dont j’ai besoin. Je sais qu’il se marre en lisant ça, c’est son éternelle pudeur qui l’y oblige.

Et pourtant, il m’appelle toujours à trois heures du matin pour savoir si je suis bien rentrée.

On n’a pas de problème de couple puisqu’on n’en est pas un. On ne veut même pas faire une colloc, on se supporterait pas. Il se prend pour un génie et parfois pour un cosmonaute et moi ça me branche moyen de jouer à l’espace tous les soirs. Puis lui ne supporterait pas m’entendre parler seule devant un texte que je bosse.

Et il aurait beaucoup de mal avec les concepts France Gall ou Ta Gueule au réveil.

Voilà, c’est un peu une déclaration d’amitié, de quiétude. C’est une confiance tranquille et un bateau certain. C’est de l’amour mais en différent. Il n’y a pas de portes qui claquent et d’angoisses dans les absences.

C’est un peu un mec génial. Et puisque je ne lui ai jamais vraiment dit, j’espère que ce billet fera guise de. Et qu’il l’apprendra par cœur sans jamais oser me le dire.

Dimanche à la campagne (oyé oyé)

Donc en fait, au départ, je m’étais faite bonnasse. Enfin, je m’étais coiffée quoi. Ça allait contre ma philosophie du dimanche, mais comme j’étais reçue, et qu’on allait manger un barbecue entre adultes consentants, j’ai trouvé que ça se faisait. Puis bon, maintenant que j’ai récupéré la frange, faut la dresser.

La surprise, c’est qu’ils sont tous venus avec leurs enfants. C’est là que j’ai réalisé combien je pouvais dire putain et merde dans une même phrase et que c’est pas joli.

Je me sentais entre deux générations. J’étais au milieu de celle qui joue à la guerre et de celle qui parle d’accouchement.

Une des gamines me répétait en boucle : t’es trop belle. T’as trop de chance, t’es trop belle. J’ai dit merci mais toi plus et après on s’est disputé pendant quinze minutes à qui était la plus moche. Je me sentais à l’aube d’une marelle en pleine cour de récré. Alors je lui ai fait un tour de magie après qu’on ait couru culs nus dans le jardin et elle était tellement impressionnée qu’elle me trouvait trois fois plus belle. Je lui ai demandé pourquoi ça marchait pas avec les mecs, mais elle a pas compris. Puis je lui ai dévoilé le secret du tour, des fois qu’un jour ça puisse l’aider à séduire l’homme en masse.

Toute la tribu a décidé de jouer à Geocaching. Une chasse au trésor mondiale, qui, a priori, a débuté au Canada il y a quelques années de là. Je me croyais alors en vacances, ou Tata d’une famille nombreuse, les parents préparaient des sacs à dos avec des goûters.

Je me sentais décalée parce que je pensais à mon boulot quand ils pensaient à faire des crêpes.

On est parti chercher le trésor et je me suis demandé sur quoi j’allais tomber. Une bague de fiançailles, un éditeur, un trèfles à quatre feuilles, Carlos ou une petite drogue dure. Il a commencé à pleuvoir bien fort mais l’idée même de trouver un butin te donne des forces dingues.

Tu les passes tes montagnes.

Je portais juste un chemisier qui pleurait sa mère sous les gouttes d’eau (il a un jour) et des talons. Mais bon, ce sont des talons tout terrain, rassure-toi.

Au bout de quelques instants, et trempée jusqu’à l’os, la petite m’a crié que son vélo n’avançait plus. Alors qu’on avait perdu le reste du groupe et qu’on était paumé au milieu de nulle part, j’ai foutu les doigts dans les chaînes, j’ai remis sa bestiole d’aplomb. J’avais pas fait de manucure, l’humanité entière s’en voyait soulagée.

Et puisque tu dis bordel, quelle fille superficielle, je te signale alors que j’étais pas épilée. Mais alors là, pas du tout. Et quand je t’écris toujours pas, donc dans le genre aventure, je suis plutôt bonne et animale tu vois. Je collais à la forêt et c’est un don de coller à la forêt.

J’ai été élevée dans les bois moi, tu crois quoi.

Puis depuis que j’ai mangé de la bouffe pour poisson, j’ai le muscle développé.

On a quand même marché trois heures. Les fringues à essorer, les mains noires, je faisais du vélo d’enfant parce que la petite n’en pouvait plus et j’avais un parapluie Hello Kitty qui ne m’abritait de rien mais m’abritait en rose.

Quand on a trouvé le trésor, et le reste du groupe, j’ai constaté que ce n’était pas Carlos et j’en chiale encore.

Mais ça m’a fait plaisir de gagner une bille plate. Elle porte en elle un dimanche à la campagne, l’impression alors de sortir un peu de soi, de se vider la tête et de prendre conscience de mille choses. J’ai eu la sensation de capter l’essentiel (philosophe un peu, merde).

Le tout étant qu’en rentrant à Paris (et ça faut que je t’en parle, c’est un problème), j’ai eu ma montée de bonheur, parce que Paris, parce que ses boulevards, parce que moi ici, mais minuscule la montée. Il manquait un truc. Paris c’est bien, mais c’est peut-être mieux quand il me manque. Paris c’est bien, mais pas ce soir.

Il faut dire que dans la bagnole, je suis tombée sur Emmenez-moi d’Aznavour. J’ai eu envie de partir, de foutre un coup de volant, vers le nord ou qu’en sais-je. J’ai ressenti le besoin de ne pas rentrer. Je n’ai pas rêvé de ma porte d’entrée. Et maintenant que j’ai retrouvé mon canapé pour t’écrire, j’hésite à me repasser la fameuse chanson.

Ou à m’épiler.

Finalement, je me demande si la vraie vie c’est pas de faire des crêpes après que tout le monde ait enlevé ses bottes en caoutchouc en réclamant une boisson chaude. Et en disant, tout bêtement : putain (enfin, sacrebleu) ça fait longtemps qu’on n’ait pas monté à la Capitale, faudra p’t’être bien qu’on y passe un de ces quatre.

(Une minute de silence pour Carlos, je vous en prie). Big Bisous, Big Bisous.

Victime d’un terrible mensonge

Parce que Camille nous parlait il y a quelques jours des Cloches et autres mythes d’enfance, et comme je m’apprêtais à laisser un commentaire bien long sur son blog, j’ai plutôt opté pour un petit billet Ovary à la ferme (c’est là que je rêve de te dire que je m’appelle Caroline et que j’ai failli m’appeler Martine*) pour te raconter le plus grand mensonge dont j’ai été victime petite, à la campagne, et pendant des années (normalement, t’es déjà un peu ému).

Donc.

Quand j’étais petite, et parce qu’il était grand, une vraie figure de papi, je le croyais.

Pour la soupe qui fait grandir, j’avais cependant des doutes, parce que je voyais bien que j’avais une croissance normale, et qu’après j’ai voulu faire quelques études (une sorte d’équation que tu ne pourrais pas comprendre avec des navets et des courbes de croissance au carré) pour décider de mes apports journaliers en potion de légumes, à savoir dans quelle mesure il était important que je me force pour devenir bonnasse et pouvoir mettre des talons un jour sans dépasser un homme. J’ai compris rapidement qu’on était en train de me leurrer avec une fâcheuse histoire de cinq fruits et légumes par jour, et que dotée d’une taille déjà convenable, j’étais simplement victime d’un énorme mensonge qui se voulait bon pour ma santé.J’ai choisi de ne plus le croire, mais ma naïveté en a décidé autrement.

Pour siffler, il faut manger de Rouy, me disait-il.

(Si tu ne sais pas ce que c’est, j’en conclus que tu ne sais pas siffler, et c’est triste.)
Donc moi, qui essayais nuit et jour de siffler, d’agiter les lèvres, les serrer, les frotter mais en vain, je me suis dit punaise-pas-con, c’est peut-être ça le secret. Et comme j’étais dans l’optique d’impressionner les garçons dans la cour de récré, et mieux, de les dresser, il me fallait progresser. Je voyais mon grand-père manger un morceau, siffler juste et toujours mieux que la fois précédente, puis me regarder l’air de dire tu vois, c’est tout con, mange ma fille.

Je ne progressais pas vite, donc forcément, je trouvais ça louche. J’ai du coup fait de nouvelles équations, en tailleur entre un coq et un cochon (pour qu’on se sente un peu plus à la ferme quand même). J’en ai déduit que le Rouy n’étant pas un aliment bon pour ma santé au même titre que la soupe, mon grand-père n’avait aucun intérêt à me gaver de ce miraculeux fromage si ce n’était pour siffler comme une femme. Donc forcément, j’y ai cru.

Puis la bonne nouvelle, c’est qu’au bout de quelques années de Rouy, même si l’overdose s’en est suivie, j’ai su siffler et plutôt bien.

Et j’ai compris, tard, que ça n’avait rien à voir avec le lait de vache et la pâte molle.
Comme première conclusion, je te dirais quand même qu’il suffit donc de croire en quelque chose pour y arriver.
Comme seconde, je ne sais pas, j’hésite : je ne supporte plus le Rouy, de sa couleur à son odeur – ou – en plus d’avoir la taille qu’il faut aujourd’hui, je sais siffler un homme, et ça, merci Papi.

*C’est pas vrai, j’ai pas failli m’appeler Martine, relax.

Tu sais pas ce que j’ai mangé ?

Tiens, c’est cadeau. Un petit poste jamais publié, écrit début janvier, auquel j’ai pensé le premier avril. C’est pas une blague, mais ça parle de poisson. 

— 

Oui, je sais, en ce moment il m’arrive des trucs assez fous.
C’est depuis que j’ai bu du champagne par les trous du nez au nouvel an.

Ça te bousille le moteur, cette affaire-là.

L’autre soir, donc, j’ai reçu un message de ma petite soeur me demandant de bien nourrir son poisson, qui en plus d’avoir passé quatre jours tout seul, s’appelle Andouillette et se fait chier dans une eau plutôt marron, mais ceci-dit j’ai du respect pour lui, parce que c’est pas facile de vivre dans un appartement où on écoute du Barbara les soirs de pleine Lune.
Elle m’a dit tu lui donnes juste trois billes et il devrait vite les gober, c’est sa nourriture préférée.

C’est pas comme s’il avait le choix.

A l’idée de lui faire plaisir, je me sentais drôlement bien. J’ai saisi le pot à petits billes mais comme je n’ai jamais rien saisi très adroitement, que ce soit un verre, un homme ou une putain d’occasion, j’ai perdu l’équilibre et constaté sans m’insulter parce que j’ai l’habitude de moi-même (quand même) que des milliers de petits billes roulaient partout dans la pièce. Un peu que si j’avais été miniscule, j’aurais pu me rouler dedans pour me rappeler combien chez Mac Do, c’était super bien la jeunesse.

J’ai commencé à ramasser et à souffler dessus, un peu comme tu fais pour ta bouffe à toi, parce que je ne vois pas pourquoi il aurait un traitement de faveur. 

Je lui ai alors donné trois billes, j’ai bien compté, je me suis dit à son échelle, enfin à la vue de la taille de son corps, tu peux pas lésiner sur les quantités. Une de moins, hypoglycémie, une de plus, tensions artérielles car obésité prononcée.

J’ai trop de peine pour ce poisson. On devrait même pas pouvoir naître poisson.

Ensuite, j’ai saisi mon verre d’aspirine qui avait atteint l’ébullition, enfin c’est pas comme ça qu’on dit je sais, et j’ai bu.

J’ai vu un truc noir qui gisait là, à deux centimètres de mes lèvres, en me disant tu m’as vu mais tu vas me boire, et puis glouglou, et puis trop tard.
Et puis j’ai compris que c’était une bille de poisson rouge et que j’avais mangé de la nourriture à poisson.

J’ai mangé de la nourriture à poisson quoi.
J’ai trouvé que c’était un truc de génie.
Puis vachement sympa pour le poisson, une espèce d’élan de solidarité, que si j’avais voulu le faire exprès pour le soutenir, genre ta vie est pauvre, tout ça, j’aurais jamais pu. J’aurais blufflé. Je lui aurais dit allez, un deux trois, et j’aurais attendu qu’il détourne le regard pour non-avaler son met.

J’ai envie d’intégrer une métaphore cochonne à ce mensonge du j’avale mais j’avale pas, mais je ne sens pas que c’est le jour. Je sais aujourd’hui que t’as envie d’histoire de prince et princesse, et de poisson qui vit dans un paradis de poissons où on mange des billes de poissons composées d’algues, vitamines, qu’après t’es boosté et tu rencontres l’amour.

Bref, j’ai eu ma dose en spiruline.

J’ai eu envie de prendre un bain.
Je me suis sentie un peu plongeuse, ou prête à baiser un marin, je sais pas.

J’ai ri toute seule pendant trente minutes.

J’ai vraiment le moteur en friche, tu l’as bien compris. Et des écailles qui me poussent au niveau du cul, aussi.

Que maintenant j’ai envie de te raconter comment j’ai retrouvé ma bague dans ma botte. Mais pas en mettant ma botte, non. En me disant et si elle était dans ma botte ? Mais ça tu t’en fous je pense. Mais c’est depuis que je fais des bulles, je me sens un peu illuminée.

Saint Cerveau

Parfois, il y a des informations emmagasinées dont je me passerais bien. Totale encombre, total inutile. Toutes ces choses que je retiens et qui ne sauveraient même pas une vie, et qui, pour être claire, ne servent strictement à rien.

  • Le prix du doliprane et son inflation
  • Les horaires de Monoprix, Daily Monop & Monop, dans chaque quartier et même les jours fériés
  • La dernière scène Sébastien – Laly (dans Hélène et ses mecs) quand il la quitte et le prénom de celle pour qui il part
  • La date, l’heure et le lieu de mon premier rapport sexuel
  • Et que j’étais en cours de physique chimie une heure avant
  • (Donc j’étais pas en sixième)
  • Le signe astro de mon examinateur de permis
  • La petite culotte que je portais quand on s’est séparé
  • Et ce qu’on mangeait pendant le dîner
  • Les paroles de Pour que tu m’aimes encore de Célion Dine
  • Mon code de Carte Bleue, parce que ça me ferait plaisir de l’oublier parfois*
  • Et à madame ma banquière
  • Le signe astro de ma banquière

Si t’as besoin d’une de ces infos affreusement con, n’hésite pas à m’appeler. Ça ne change pas ma vie, mais des fois que ça puisse aider la tienne.

*Je serai obligée de te mentir

Je suis définitivement magique

Enfin après t’en fais ce que tu veux. 

Ce matin, je cherchais ma télécommande. Un peu comme je cherchais ma bague il y a un mois. Mais point d’état fou à remuer la terre, je me suis dit une télécommande, c’est pas bien grave, j’ai peu d’attaches avec ma télécommande. Sentimentalement parlant, c’est le néant.

Le seul truc qui m’emmerdait, c’était d’imaginer la gueule de la télé. Je sais pas, elles doivent avoir une relation particulière.

Bref, je voulais juste dire que je l’avais retrouvée dans ma botte quoi.

Enfin une autre botte. Mais une de mes bottes.

J’ignore par quel miracle tout ce que je paume se retrouve à se taper mes pieds. Se passe un truc étrange entre mes chaussures et moi, c’est comme si elles voulaient un peu me rendre service, voire me sauver la vie. 

La saison tongs qui se profile pourrait bien me tuer.

Billet confidentiel #3

C’est pas grave si je pleure.

Mon pyjama est sexy, mon bol est vintage et ma clope est cowboy.

Il pourrait être pire ce réveil.

Ils pourraient être pire mes projets, mes manques, ils pourraient ne pas avoir de noms.

C’est pas grave si le soleil n’est pas venu, j’ai les cheveux déjà coiffés sans les avoir touchés, j’ai le parquet sûr qui me sent glisser ici-et-là, j’ai des choses à ranger, des questions à taire et peut-être encore assez de forces pour les bâillonner et les étouffer dans leur jus.

Et si elles demeurent, eh bien c’est pas grave. J’ai peut-être assez d’années devant moi pour constater qu’un jour, elles auront fui d’elles-mêmes, pour réaliser dans quelques temps que tout passe et que c’est un peu la seule chose qui réconforte.

Dans quelques temps, les réponses se bousculeront à la porte quand d’autres interrogations nouvelles seront en marche dans les escaliers. On n’en finit jamais, il suffit sans doute de le savoir pour trouver les matins un peu moins dégueulasses.

C’est pas grave si l’eau du bain m’enfume et si j’ai mal à mon inspiration. Parfois, ça lui fait plaisir quand j’ai mal à sa fuite parce que j’ai bien à ses retours.

C’est pas grave si j’ai mal à vous, mal à mes samedis, mal à mes non-sens, à ma maladresse, à mon appartement, si j’ai mal à mon attente.

Elles pourraient être pire mes attentes, elles pourraient ne pas avoir grand nom.

C’est pas grave si je pleure, j’ai mis des noms sur tout ça, il n’y a plus qu’à les frapper, les éviter ou les laisser faire. Je vais me jouer au dé.